Jeunes et citoyens mobilisés contre les discriminations
Réunis au Mémorial le 4 juin pour la clôture du projet « Jeunes et citoyens » pour 2021, la dizaine de lycéens présents – plusieurs participants n’avaient pu faire le déplacement ce jour-là - a présenté ses travaux et créations devant les autres. Ce fut aussi pour eux l’occasion de s’exprimer et de partager leurs vécus.
Elle subit le racisme au quotidien en raison de son nom et de l’origine de ses grands-parents, venus d’Algérie et raconte avec émotion une expérience traumatisante vécue par sa grand-mère il y a quelques années : alors que celle-ci faisait tranquillement ses courses dans un supermarché, une cliente s’est précipitée sur elle pour lui arracher son voile.
Il a compris ce qu’était l’ostracisme lorsque sa mère s’est installée avec sa compagne. Pendant longtemps, il n’a pas osé en parler à l’extérieur du cercle familial.
Depuis l’école primaire, parce qu’elle est un peu ronde, elle entend, dans la rue ou au sein de son établissement scolaire, des moqueries et des remarques insultantes sur son physique. Elle s’est souvent interdit de répondre aux questions des profs pour ne pas avoir à traverser la classe pour aller au tableau.
À l’arrêt de bus proche de son domicile, elle était harcelée par un groupe de garçons parce qu’elle est une fille. Alors elle s’est levée plus tôt et marchait tous les matins jusqu’à un arrêt de bus plus lointain.
À cause de leur genre, de leur physique, de leur nom, de l’origine ou de l’identité de leurs parents, de leur sexualité ou d’un autre motif, ces jeunes lycéen.ne.s ont déjà fait, malgré leur jeune âge, l’expérience du rejet et de la discrimination.
Ne plus subir ni se taire
Est-ce l’une des raisons pour laquelle ils se sont portés volontaires pour participer au projet « Jeunes et citoyens » porté par le Mémorial du Camp de Rivesaltes en cette année scolaire 2020/2021 ? Même pas sûr, car certains d’entre eux ont choisi de travailler sur des projets sans rapport avec leur situation personnelle. Ils ont parlé de discriminations, mais pas forcément de celles qui les touchaient directement, ce qui démontre une grande ouverture d’esprit.
Malgré le Covid qui a chamboulé cette année scolaire, en composant avec les contraintes imposées par les mesures sanitaires, ces élèves de trois lycées des Pyrénées-Orientales ont pu rencontrer des personnalités venues dans leurs établissements évoquer différents types de discriminations. « Les interventions étaient très intéressantes, s’enthousiasme Jade, notamment celle des membres de l’association LGBT+66 et du Refuge : leurs témoignages m’ont beaucoup émue. »
En parallèle, ils ont été accompagnés dans le choix de leurs projets puis, s’ils le souhaitaient, dans leur réalisation. Le mode d’expression était libre : photos, vidéos, textes, articles, posters, affiches... « C’est super d’avoir des projets comme ça au lycée, que ce soit accessible et que ça nous laisse la parole, applaudit Evy qui a écrit un article très documenté sur la discrimination envers les travailleur.se.s du sexe. La présentation de mon article m’a permis d’être confrontée à plusieurs modes de pensée par rapport au sujet que j’ai traité, d’entendre des avis divergents et je trouve ça intéressant. »
De futur.e.s militant.e.s pour l’acceptation des différences ?
Inégalités femmes/hommes dans le monde, putophobie, transphobie, discriminations envers les personnes non binaires et pansexuelles, grossophobie, sexisme au lycée : les sujets choisis par ces jeunes tournaient majoritairement autour de l’identité, le genre et la sexualité, des thématiques qui les intéressent fortement. Sur ces sujets, le Mémorial du Camp de Rivesaltes accompagne les recherches de participants en mettant en évidence les mécanismes à l’œuvre dans toutes les formes de discrimination. L’éclairage apporté par l’histoire du lieu permet de faire le lien entre racisme, antisémitisme et discrimination et de mettre en perspective ces phénomènes.
Après toutes les présentations, le débat a porté sur les points communs entre les différentes discriminations : haine envers un individu ou une communauté, instinct de supériorité, rapports de pouvoir, mécanismes d’installation d’une domination…
Le projet « Jeunes et citoyens » a révélé chez certain.e.s des participant.e.s une envie de continuer à lutter, chacun.e à sa façon, comme le prouvent les réactions entendues tout au long de la journée : « Je me revendique féministe » ; « L’éducation à l’ancienne est obsolète, il faut que ça change » ; « Ce que j’ai voulu exprimer, c’est la tolérance ».
On laissera le mot de la fin à Ambre, élève de terminale au lycée Maillol de Perpignan : « J’ai kiffé mon projet car le sujet me touche particulièrement et j’étais heureuse de le faire partager. Ça permet de voir qu’on n’est pas toutes seules à vivre des discriminations et pas toutes seules à combattre des injustices. »
Vu et écrit par Marianne Bernede, journaliste indépendante
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